Brève histoire des relations entre le Japon et l'Occident

 

Depuis le premier contact direct, au XVIe siècle, les rapports fluctuants entre le Japon et l'Occident témoignent de la confrontation entre des civilisations distantes où se mêlent méfiance, curiosité et fascination.

Au gré des vicissitudes de l'histoire, l'archipel se montre plus ou moins enclin à ouvrir ses portes aux étrangers, porteurs de savoirs différents, de modernité mais aussi de dangers potentiels pour l'équilibre d'une société insulaire.

De leur côté, les puissances occidentales, en quête d'une domination tour à tour religieuse, politique ou commerciale sur le reste du monde, tentent régulièrement d'établir un contact durable avec une culture qui leur apparaît d'emblée singulière et raffinée.

Les différentes phases de cette histoire ne sont pas sans incidence sur l'évolution de la cartographie japonaise.

Les premiers contacts

Au XVIe siècle, l'Espagne et le Portugal se partagent les grandes campagnes d'évangélisation dans le Nouveau monde et en Asie.

L'Occident prend connaissance de l'existence du Japon grâce aux récits de Marco Polo. Il y évoque la présence d'une île d'une grande richesse au large des côtes chinoises qu'il appelle Cipango.

Des navires portugais sont les premiers à accoster dans l'archipel en 1543 lorsqu'un typhon les pousse sur l'île de Tanega-Shima, au sud de l'île de Kyūshū. Probablement impressionnés par l'originalité de cette civilisation et sa maîtrise des arts militaires, les Portugais se contentent d'échanges commerciaux. Les Japonais achètent à ces « barbares du Sud » (Nanban-jin) principalement des armes à feu telles que des arquebuses, qui jouent par la suite un rôle déterminant dans les guerres entre clans qui secouent l'archipel.

Le prêtre navarrais François-Xavier, l'un des fondateurs de la Société de Jésus, établit notamment des missions à Goa, en Chine et en Malaisie. Au Japon, il fonde la mission de Kagoshima, au sud de l'île de Kyūshū, en 1549.

Les missionnaires jésuites tentent stratégiquement de convertir des élites locales afin d'infléchir la politique religieuse au Japon. Ainsi certains clans se christianisent et le nombre de catholiques serait monté jusqu'à 700 000 selon un missionnaire du début du XVIIe siècle.

Divers incidents, outre de nombreux soupçons sur l'ingérence et les visées territoriales des Espagnols et Portugais, amènent les grands seigneurs de guerre qui tentent d'unifier l'archipel à se méfier de l'influence occidentale.

La politique du « Sakoku »

 

Dès 1587, Toyotomi Hideyoshi défend aux dirigeants de clans de se convertir. Son successeur, le shōgun Tokugawa Ieyasu interdit définitivement le christianisme en 1614.

S'ouvre alors une période de persécutions de près de quarante ans, marquée par des tortures et des massacres comme celui de Nagasaki en 1622, où cinquante-deux chrétiens sont brûlés vifs ou décapités.

Pendant l'ère d'Edo, le shogunat des Tokugawa préserve jalousement son autonomie et son indépendance  en limitant les contacts de l'archipel avec  l'extérieur, pratiquant la politique du « Sakoku », « la fermeture du pays ». Seuls les marchands hollandais, protestants qui se sont gardés de tout prosélytisme, parviennent à garder un comptoir à Nagasaki, sur l'île artificielle de Dejima où ils sont rigoureusement confinés.

Véritable ville dans la ville, Dejima constitue néanmoins un point d'échange de savoirs, notamment en sciences et en médecine, entre le Japon et l'Occident.

Une entrée en force

Grâce à Dejima, les Hollandais conservent un net avantage commercial sur les autres puissances maritimes et marchandes jusqu'au milieu du XIXe siècle. Ce monopole est remis en question par les États-Unis qui envoient le commodore Matthew Perry ouvrir de nouvelles routes commerciales dans l'archipel nippon.

En 1853, il ancre ses quatre canonnières à vapeur dans la baie d'Edo et menace d'en faire usage si le Japon continue de refuser l'ouverture de ses ports.

Quelques mois plus tard, avant même le terme de l'ultimatum, les « navires noirs » reviennent plus nombreux car Français, Néerlandais, Britanniques et Russes ont joint leurs forces aux Américains.

Le shōgun, redoutant le sort réservé à la Chine lors de la récente guerre de l'opium, cède sous la pression et la convention de Kanagawa est signée le 31 mars 1854, permettant aux Occidentaux d'entrer dans les ports de Shimoda et d'Hakodate.

En 1858 est signé le Traité d'amitié et de commerce entre les États-unis et le Japon, bientôt suivi de traités équivalents avec les autres puissances occidentales. Les ports d'Edo, Kōbe, Nagasaki, Niigata et Yokohama sont ouverts au commerce international.

L'ouverture au monde extérieur, ajoutée au contexte économique tendu et à l'affaiblissement du pouvoir shogunal, provoque une grave crise politique qui débouche sur la restauration de l'Empereur Mutsuhito et la modernisation accélérée du Japon pendant l'ère Meiji (1868-1912).